Damien Mauro, dénommé « GoddoG » dans le monde du street-art, inaugure une peinture en perpétuel mouvement, toujours admirablement orchestrée. Elle nous enchante car elle nous conduit, avec beaucoup de bonheur et de volupté dans un univers marqué à la fois par le fantastique et l’onirisme.
Un puzzle ou un patchwork
En fait, l’artiste réussit un tel pari grâce à des compositions éblouissantes et grandioses qui ressemblent davantage à un puzzle ou à un patchwork.
Pour impulser un rythme rapide et effréné à ses créations, il réalise son travail sous forme de bandes qui se juxtaposent et se succèdent les autres aux autres. Cela crée une disharmonie visuelle dynamique propre à engendrer une sensation de vitesse.
Ce complexe assemblage de différentes pièces rappelle quelque part Le Nu descendant un escalier d’un certain Marcel Duchamp qui a utilisé pour sa part la ligne droite, répétitive et segmentée pour exprimer la décomposition du mouvement.
On peut aussi rapprocher le travail de cet artiste avec le futurisme italien et le cubisme analytique. En effet ce dernier mouvement recherchait aussi la simultanéité de la représentation de plusieurs aspects de la composition.
En fait au final il s’agira toujours d’aboutir à une dynamique du mouvement propre à nous conduire dans cette quatrième dimension dont parlaient certains peintres cubistes et surréalistes.
Cet artiste a effectivement le don de nous faire échapper à la pesanteur terrestre. Et joue avec brio sur la dimension de l’ailleurs et de l’étrange.
Une dimension de l’ailleurs
Cette dimension de l’ailleurs est puissamment affirmée par un chromatisme violemment expressif. Le peintre l’intensifie volontairement par des couleurs riches et très vives. Avec cette sensation enivrante de la vitesse pour nous donner l’accès à cette autre dimension.
On a l’impression que l’artiste veut transporter le spectateur dans des espaces inconnus grâce à ces formes tourbillonnantes qui agissent comme des aspirateurs cycloniques (voir ci- dessous)
L’écriture qu’utilise « GoddoG » constitue une violence de l’attaque contre les habitudes visuelles. Il joue à merveille sur l’irritation optique par la concentration de lignes ondulatoires.
Travail très proche des transgressions opérées par le mouvement de l’Op Art. Toujours dans le seul but de nous faire accéder à un monde merveilleux et irréel !
Des dessins semblables à des labyrinthes
De manière constante l’artiste revendique un goût prononcé pour un « univers étrange, mystique, fantastique et poétique ».
Le côté mystique et étrange, on le retrouve également dans l’accumulation de dessins semblables à des labyrinthes.
Il utilise dans ce but une calligraphie personnelle comparable aux hiéroglyphes Maya ou Egyptiens.
En fait le plus souvent, il s’agit d’écritures imaginées par l’artiste comme provenant de son inconscient. Mais à côté de cela, il existe une réelle dimension sacrée.
Celle-ci résulte de la symbolique des nœuds et des liens que l’artiste révèle et qui sont également les manifestations magico -religieuses des civilisations anciennes.
Ainsi derrière l’énorme réseau des lignes, l’artiste transmet à sa manière une chose essentielle à savoir que le cosmos aussi bien que la vie humaine, tout est lié à tout par une texture invisible.
Enfin la présence ici ou là de représentations d’une clé et d’une serrure renforcent par ailleurs toujours l’idée d’un labyrinthe mais avec cette possibilité de s’en évader. Et par conséquent celui-ci rejoint aussi l’idée d’un « noeud » qui peut être « dénoué ». L’univers de « GoddoG » n’est donc jamais un lieu d’enfermement. Bien au contraire puisqu’il permet davantage la libération, comme une invitation permanente au voyage et au rêve.
Christian Schmitt
www.espacetrevisse.com
Site de l’artiste
https://www.flickr.com/photos/latelier_de_goddog/